Première mission de terrain au Maroc sur les traces du caméléon commun
- Sebastien Metrailler
- il y a 4 heures
- 2 min de lecture
Entre août et septembre 2025, les équipes de Fauna Morocco ont conduit la toute première mission du projet « Étude et conservation du caméléon commun (Chamaeleo chamaeleon) au Maroc », initié en partenariat avec le Caméléon Center Conservation (CCC).
Cette mission marque le point de départ d’un projet visant à mieux connaître les populations de caméléons marocains, leurs habitats et les menaces qui pèsent sur eux, afin de poser les bases d’un plan de conservation à long terme.

Un reptile étonnamment méconnu, mais menacé
Présent dans de nombreuses régions du Maroc, le caméléon commun demeure un reptile encore mal connu.
Les premières observations de terrain ont révélé plusieurs pressions majeures qui fragilisent ses populations :
La destruction et fragmentation des habitats naturels ;
La collecte et la revente d’individus vivants ou morts ;
Les usages traditionnels en médecine ou en sorcellerie ;
Les effets de la sécheresse et les pièges involontaires (bassins, routes, structures agricoles).
Dans certains souks, des caméléons sont encore vendus séchés et brûlés comme encens pour éloigner le « mauvais œil », ou utilisés comme remèdes supposés contre certaines maladies.
D’autres sont capturés vivants et proposés à la vente comme animaux de compagnie, souvent dans des conditions précaires et illégales.

Une première base de données sur la répartition et les usages
Au terme de trois semaines d’exploration, l’équipe a documenté plus de 50 individus dans 12 localités réparties à travers le pays.
Les données recueillies comprennent :
12 caméléons observés en milieu naturel,
+ d’une dizaine maintenus en captivité et destinés à la vente,
et plusieurs individus retrouvés morts, souvent près de bassins de rétention ou de routes.
Parallèlement, une vingtaine d’entretiens ethnobiologiques ont été réalisés auprès d’habitants, de commerçants pour mieux comprendre les croyances, usages et perceptions associés à l’espèce.

Des résultats riches d’enseignements
Les premiers résultats montrent que :
la moitié des personnes interrogées considèrent le caméléon comme inutile ou sans intérêt car considéré comme innoffensif,
40 % lui attribuent des vertus mystiques ou médicinales,
60 % estiment que l’espèce devient plus rare,
et la sécheresse ainsi que la dégradation des habitats figurent parmi les menaces les plus souvent citées.
Ces premiers constats confirme la nécessité d’une approche pluridisciplinaire, alliant écologie, sciences sociales et sensibilisation communautaire.

Et maintenant ?
Les prochaines missions, prévues pour décembre 2025 puis le printemps 2026, permettront de :
compléter l’échantillonnage morphologique,
tester un protocole de prélèvements génétiques,
et affiner la compréhension des dynamiques régionales des populations marocaines.
Ce travail contribuera à orienter les actions de conservation prioritaires, qu’il s’agisse de la protection des populations sauvages ou de la gestion éthique des individus issus de saisies.
Ce projet mené en partenariat avec le Parc zoologique de Paris, Morocco Herpetology, Université Ibnou Zohr et La perle Aux Oiseaux illustre la philosophie du CCC : associer science, terrain et acteurs locaux pour bâtir des solutions durables au service des caméléons et des communautés qui partagent leur territoire.




